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La Transpy du Babaz - De Cadaques à Sieste (2)

Cette deuxième partie de ma grande traversée relate les trois premières étapes espagnoles. Elles m'emmènent de Cadaques en Catalogne, au charmant petit village de Sieste en Aragon. Ce nom de village, sonne-t-il comme quelque chose de prédestiné ?  
 
 
Entre Cadaques et Sieste, je me suis posé dans deux endroits aux tons bien différents. L'un n'est pas dénué d'intérêt sur le plan culturel. L'autre m'a plongé dans l'Espagne de tous les jours. 
 
Itinéraire Suivi: 
 
 
Itinéraire depuis le début du voyage : 
 
 
Mardi 2 mai, comme d'habitude, je suis prêt à partir à 9h00.  Je traverse la plaine de Figueras et rejoins le lac de Banyoles. Il y a nettement moins de monde que l’année dernière, lors de ma balade aragonaise. Ensuite, je passe le merveilleux village de Santa-Pau où j'ai déjà séjourné, quand je m'étais envoyé en l'air en Garrotxa (voir ici). Puis c'est la traversée de la ville d’Olot. Sur les hauteurs, je me pose quelques minutes afin de profiter une dernière fois des paysages de cette région magique qu’est la Garrotxa, l’autre « Pays des volcans ».
 
La Garrotxa
 
De là, je prends une route, nouvelle pour moi, amenant à Saint-Joan-de-les-Abadesses puis rejoins Ripoll. Je descends jusqu'à La-Farga-de-Bébié. Mon but ? Rejoindre une piste allant au Castel de Montesquiu. Je n’ai pas grand-chose à faire du Castel… Cette première étape, de me traversée Est-Ouest des Pyrénées espagnoles, est une « petite mise en jambes » sur le plan du pilotage dans les chemins. Avant que les choses plus sérieuses, ne commencent dans les prochains jours. 
 
La piste est bien là. Le bitume s’arrête et laisse place à un terrain herbeux. C’est, à priori, un chemin rural. Soudain, après quelques kilomètres, face à moi, le chemin large se rétrécit jusqu’à devenir même, étroit. J’arrête la moto, la pose sur sa béquille latérale. Mince, je suis allé un brin trop loin, avant que mon cerveau ne déclenche l’alerte. Le demi-tour ne va pas être aisé, si jamais cela doit se conclure ainsi. Je pars en reconnaissance, à pied, évidemment. Vu ce qui est devant moi, je ne la sens pas bien ma petite affaire. La piste se transforme en sentier. Je risque de me trouver bloqué plus loin. Effectivement, 50 mètres en avant, je vois le sentier s'enfoncer dans la forêt. Il est encore plus étroit et, d’ailleurs, j’avise un marquage sur la droite qui précise que les motos (enduros, d’après le dessin) sont interdites. 
 
 
La décision s’impose à moi, sans appel. Je dois faire demi-tour. Tant bien que mal, d’ailleurs, vu ce que j’ai écrit plus haut. A force de muscles, de poussées dans les jambes et de coup de moteur en avant, j’y arrive.  Du coup, je rejoins la route C17. Elle et le GPS m'emmènent jusqu’au village de Montesquiu. Là, je retrouve mon itinéraire et continue, sans un œil vers ce satané Castel, vers Sant-Agusti-de-Lluçanes. De là, je passe à Alpens. Tiens! Le restaurant théâtre (voir ici) vu au retour de Ribeira Sacra semble définitivement fermé. Quel dommage!. J'arrive à Berga vers 13h45. J'avise un panneau indiquant le sanctuaire de Queralt. Je cherche aussi, depuis un petit moment, un endroit pour me poser et déjeuner. Je me déroute en direction du sanctuaire. En Espagne, j’ai toujours trouvé de beaux endroits près des églises ou autres édifices religieux, pour des pauses-déjeuner. Je profite aussi de la montée de quatre kilomètres en lacet pour faire des repérages. C’est bon! J’ai un visuel sur l’endroit où je m’arrêterais au retour pour sortir le réchaud.  
 
Tout en haut, se trouve donc le sanctuaire de la « Mare De Déu » de Queralt. Ce lieu est le balcon sur la Catalogne. Un jeune homme est d’ailleurs en train de peindre le paysage. Il n’y a pas foule, nous ne sommes que tous les deux. Le bâtiment religieux se trouve encore plus haut. On y accède par un sentier très escarpé où je ne m’aventure pas. Il y aussi un monte-charge. Là aussi, je ne m’y aventure pas… Je profite juste quelques minutes de ce superbe panorama. 
 
J’ai raté de peu l’évènement du lieu… Une procession a lieu tous les 25 avril. Elle commémore la première apparition de la Vierge. Apparition qui provoquera donc au XIVe siècle, la construction du sanctuaire. 
 
Berga et la Catalogne
 
Lors de la descente, j'aperçois une sorte de stèle, à priori destinée aux ingénieurs de Montes. Je ne sais dire de quoi et de qui il s’agit. Mais la vue sur la barre rocheuse est également superbe. Je m'y arrête et monte voir. Plus bas, je m'arrête sur l’aire de pique-nique, repérée lors de la montée, afin de prendre mon repas. 
 
 
 
 
Depuis Cadaques, chaque « embalse » que je croise est, soit presque vide, soit avec un niveau très bas. La différence de niveau, visible sur la photo ci-dessous, représente environ dix mètres. Depuis plus de dix ans que je sillonne ce pays, que ce soit au printemps ou en été, je n’ai jamais vu de niveau si bas dans les lacs. 
 
 
Pour l'approche de ma ville étape, j'ai repéré, lors de la préparation de mes itinéraires sur la carte, des chemins ruraux qui, normalement, sont des pistes en terre et cailloux. L'application Tomtom Go ne s'y trompe pas d'ailleurs... Elle me dit que je dois faire demi-tour... Mais les chemins ruraux ont tous été bitumés. Les cartes Tomtom ne sont pas à jour. 
 
 
Finalement, j’arrive plus vite à Solsona, mon étape de ce soir et de demain. L’hôtel qui m’accueille est un superbe bâtiment d’époque moderniste (1920). La ville est d’ailleurs conforme à ce que j’en ai vu dans mes lectures. Le temps de m’installer et prendre une, nécessaire, douche, je pars en vadrouille. 
 
Hôtel Sant Roc
 
Solsona est un siège épiscopal depuis 1593. La ville préserve, assurément, tout un vieux quartier plein de charmes. C’est souvent le cas en Espagne. Les villes ont souvent un centre historique superbe, alors que les faubourgs « peuvent » laisser à désirer. Les édifices séculaires pullulent au sein de l’enceinte des remparts. L’entrée dans le centre historique est possible via trois grandes portes. La promenade est agréable.   
 
Solsona
 
La ville est aussi très fidèle à ses traditions et à son patrimoine. Solsona est la ville catalane qui possède le plus grand nombre de géants et d’éléments du bestiaire populaire au mètre carré. D’après mes lectures, ils sortent parader lors de célébrations telles que le carnaval, le Corpus ou la « Festa Major », dédiée à la « Mare de Déu del Claustre ». Aujourd’hui, les géants attendent derrière une porte mystérieuse… Si on appuie sur le bouton qui va bien, ils se laissent apercevoir à travers les vitres d'une grande porte fermée, sans doute pour les laisser dormir tranquille. Les jeunes enfants ne semblent pas de cet avis, durant la journée.  
 
Les géants enfermés
 
La cathédrale de Solsona est remarquable. C’est un édifice Romano-gothique construit entre les XIIe et XVIIIe siècle. L’intérieur est, semble t’il, également remarquable. Personnellement, je n’y suis pas sensible. Le trésor de la cathédrale est un retable baroque de la « Mare de Deu de la Mercé » (1753). 
 
La cathédrale de Solsona
 
 
 
En à peine une heure trente, j’ai pris le poumon de la ville. Elle me plaît. Je peux aller me poser pour boire un verre et chercher où dîner. 
 
Cette étape de 290 kilomètres aurait dû me faire parcourir environ 20 % de chemins, soit près de 55 kilomètres. J'en ai parcouru, à peine dix, avant de faire demi-tour ce matin, et mes chemins ruraux de l'après-midi se sont transformés en routes. La mise en jambes n’a pas fonctionné. Je verrai cela dans deux jours. 
 
Mercredi 3 mai est donc un jour de marche à pied. Mon choix se porte sur la randonnée amenant à l’église Sant-Esteve-d'Olius et au « cimetière moderniste ». Les treize kilomètres annoncés, avec un dénivelé de 300 mètres, me semblent supportables. Je devrais en avoir pour quatre heures maximum, à priori. 
 
 
 
Une seule chose m’inquiète… C’est le peu d’ombre, d’après les éléments disponibles sur la carte. Le chemin parcourt la campagne. Il monte doucement vers un bosquet et une colline au loin. Pour autant, cette colline ne semble pas ma cible. C’est encore trop près. Je ne sais dire si la cible est visible. Pour l’instant, le soleil n’est pas un problème. Il est 9h30 et la température doit être de 18 degrés. 
 
 
Arrivé au bosquet, la colline s’avère plus montagneuse que je ne l'imaginais. La grimpette n’est pas rude, mais tout de même… La fraîcheur du petit-bois est appréciable. Les odeurs qui s’en dégagent également. Odeur de pins, d’épicéas et peut être quelque chose qui ressemble a de l’eucalyptus. Pas cette espèce, je n’en vois pas, mais quelque chose qui y ressemble. Qu’est que cela peut bien être ? Je cherche encore... 
 
Toujours est-il que j'arrive à l'église d’Olius, après deux bonnes heures de marche. 
 
Sant-Esteve-d'Olius
 
L’église de Sant-Esteve-d’Olius est, d'après les éléments glanés ci-et-là, un des plus importants monuments de l’architecture lombarde de la fin du XIème siècle. L’église est un temple de grandes proportions avec une seule nef, supportée par quatre grands arcs. Le clocher carré possède quatre fenêtres avec des arcs plein-cintre. Sous lui, s’ouvre une moulure avec des embrasures. Malheureusement, le bidule est fermé à clef. Il y a peut-être une solution en appelant un numéro affiché sur la porte, mais je ne m'en sens pas l'envie... Et la capacité de m'exprimer en catalan. 
 
Dommage, car sous l’autel, il y a la présence de la crypte dédiée à la fameuse Sainte-Marie. La crypte est, toujours selon la littérature disponible, la partie la plus élégante et originale de l’église. Je n'ai vraiment pas de bol avec cette clef... Je n'ai plus qu'à en faire le tour, à l'extérieur. 

J'ai aussi parlé, au début de cette journée du « cimetière moderniste ». C’est, assurément, une véritable curiosité. Dans l’année 1915, un projet pour un nouveau cimetière est commandé à l’architecte du diocèse, Bernadí Martorell i Puig. Comment ? Vous ne le connaissez pas ? C'est un architecte de style « art nouveau » qui a reçu l’influence du célèbre « Gaudí ». Lui, tout le monde le connaît. 

Ce cimetière est vraiment original, dans le sens où l'environnement rocheux est partie intégrante du lieu. Voyez vous-même. De loin, c'est comme cela :  

L'entrée du cimetière moderniste
 
J'approche de la porte, tire la « chevillette » et soulève la « bobinette cherra » pour entrer. Là, ce n'est pas fermé, contrairement à l’église d'Olius. 
 
 
Le lieu s'ouvre à moi. Je prends connaissance de son ampleur, de son aura, si je peux employer ce mot pour un amas de roches, d'os et de croix à symboles indéniablement catholiques. 
 
Mon épouse vous dirait que j'ai une relation particulière à ces lieux de sépultures. Je ne supporte pas l'idée qu'on vienne emmerder les morts dans leurs dernières habitations. Je m'insurge à chaque fois que j'entends parler d'égyptologue ayant profané des tombes, ou bien de chercheurs ayant trouvé des ossements. Mais bordel, laissez les donc tranquilles. 
 
Alors là, autant vous dire que j'avance en regardant bien où je pose mes godillots. J’ai un profond respect et un sentiment d'entrer dans un lieu où je suis juste un invité. Donc, selon mon éducation, je n'en fais pas trop.
 
 
 
 
1916 est la date de la tombe la plus ancienne que j'ai trouvée, sachant que des croix semblant très anciennes sont aussi présentes, mais sans indications datées. Je ne sais pas encore dater la rouille et l'oxydation... Mes études ne m'ont pas appris cela. 
 
Il est temps de repartir. 
 
A 14h00 je suis de retour à Solsona. Je choisis de déjeuner dans un restaurant affichant un menu du jour à 14€. Bien m’en a pris. C’est un des meilleurs repas que j’ai pu faire en Espagne pour ce prix. Ce menu permet un choix parmi 5 entrées, 5 plats et 5 desserts. Enfin ça, je l’écris maintenant, parce qu’avant, rien ne permettait de le savoir. La jolie dame qui me sert ne parle pas un mot d’anglais. Le Catalan ou le Castillan, à la rigueur. Enfin! A force de sourires, de rires et de gestes, nous arrivons à presque nous comprendre. J’en veux pour exemple le carpaccio qui arrive pour mon entrée. Le carpaccio est, en fait, un gaspacho tout à fait délicieux et qui me sied bien mieux, d’ailleurs. Le plat, un ragoût de côte de porc et le dessert, une crème catalane, sont tout aussi bon. Le vin est servi avec le menu. J'aurais pu boire la bouteille, mais je ne prends qu'un verre. Le café également. Je dois juste payer, en plus, la bouteille d’eau plate. J’en ai, en tout et pour tout, pour 15 €. Incroyable, non ?  
 
Jeudi 4 mai, jour de ma fête. L'étape d'hier était faite pour me mettre en jambes, du point de vue des chemins de terre. Cela a été raté. 
 
Aujourd'hui, normalement, c'est plus sérieux. J'entre dans le vif du sujet « hors bitume ».  J'en veux pour preuve l'application « Tomtom Go » qui me refuse l'affichage des itinéraires des deux jours à suivre. Le message est  sibyllin : « Pas de parcours possible »... Autant dire que les chemins lui posent problème. 
 
Cette fois, je suis prêt à 8h30. J'ai pu prendre le petit-déjeuner avec une demi-heure d'avance sur l'horaire habituel. Le guidage GPS, qui va bien, est tout de même en place pour cette journée, grâce à l’aide d’un membre du « forum Terre et Bitume ».  Dans l’instant, je remonte vers le Nord. 
 
Mirador de Vilamala
 
Cette poussée nordiste me conduit à travers les routes catalanes, jusqu'au village de Castellar-de-Tost. Enfin, un village... Une ferme, et deux autres maisons, devrais-je plutôt écrire. C'est là que ma première piste commence. Je me pose près du cimetière. La piste commence juste là. On la voit sur la photo de gauche en haut ci-dessous. Il est temps de baisser la pression des pneus, pour une meilleure adhérence dans les revêtements hasardeux, que sont les « gravel road ». J'en profite, également, pour désactiver mon airbag. En effet, dans les chemins, je roule à très faible allure et une chute est plus vite arrivée que sur la route. Inutile de provoquer le déclenchement de l'airbag dans ces condition. Cela ne me sert à rien. 
 
La piste de Castellar-de-Tost
 
Je suis un peu fébrile, cela fait quelque temps que je n'ai pas piloté sur des chemins. C'est parti. 
 
Ce premier secteur de pistes est celui qui m'inquiète le plus, pour cette journée. L'étude de la carte ne m'a pas appris grand-chose, si ce n'est que c'est une surface en terre non stabilisée. Pour les initiés au travail de « Cricri » avec Osmand, la piste est marquée en vert pointillé et « taguée » piste VTT. Les trois premiers kilomètres sont faciles. Quand j'entre dans le bois, les loups sortent du chemin... Cela monte raide, et c'est très raviné par endroit. Les pierres sortent pour m'attraper. 
 
Si j'écris ce qui me passe par la tête, ça donne ceci:
 
    - P'tain ça grimpe raide là!
    - Allez, debout bonhomme, c'est le moment d'être en forme. Mets ton poids (indéniable) sur l’avant. 
    - Sois souple sur les jambes, détends les épaules, ne crispe pas les mains.
    - Ton regard ? Loin, ton regard, tu t'en moques des ornières qui sont là, tu les as déjà vu du bas. 
    - Respire!
    - La vache, gaffe au pied, ça secoue! Je vais me vautrer là... 
    - Non, ça passe. 
    - Mets du gaz, mec! Faut arriver en haut. 
    - Ca tape! Tant pis, elle est faite pour ça, ta meule. 
    - P'tain, mais respire bon Dieu, tu vas étouffer dans ton jus, là.
    - Inspire!
    - Expire!
    
C'est là que je décide de m'arrêter dans la pente avant le virage en épingle. Heureusement que je suis grand, je tiens la moto avec les jambes, le moteur est coupé et en prise. Tout cela pourrait être pire... Je monte là, mais en descente, je suis nettement moins fougueux... Mais il faut bien que je reparte. 
 
    - Allez contact! Mets du gaz bonhomme, sinon tu vas tomber. 
    - Du gaz, bordel!
    -.... 
 
Tant bien que mal, et dans un style pas vraiment académique, j'arrive au bout de cette première piste. Autant dire que je n'ai plus froid. Je prends à gauche pour descendre jusqu'à Barceloneta et Sorribes. Je passe le col de la Trava et m'arrête au mirador du même nom.  Le paysage est celui visible sur la photo panoramique ci-dessous. 


La route me conduit jusqu'au prochain secteur de chemins prévus, à Taus. Il est 13h30, je dois me mettre en recherche d'un endroit pour déjeuner. Je devrais être tranquille, étant sur un chemin... Cette piste est très roulante. C'est de la « Gravel Road » typique. 

Le village de Taus
 
Quelques difficultés apparaissent, mais rien de comparable avec ce que j'ai rencontré ce matin. Au détour d'un virage, et de deux rochers, je trouve un endroit à l'ombre. C'est là que je m'arrête et sors le réchaud. Il est 14h00. 
 
 
 
Je retrouve le bitume. Encore quelques kilomètres et je serais à mon étape du jour. Qu’en dire ? Que je suis à une lettre de parler d’un abruti notoire… Comme me le racontait une personne rencontrée dans un diner’s américains (voir ici). 
 

Je m'arrête donc dans la ville de « Tremp ». Vous l’avez ? La lettre évoquée plus haut. Rien de particulier ici, si ce n'est qu'après 240 kilomètres, je ne voulais pas rouler davantage. En conséquence, j'ai réservé dans le seul hôtel trouvé à prix raisonnable, sans autres besoins que de pouvoir dormir et manger sur place, car je savais que je serais fatigué. Du coup, rien à voir, si ce n'est le côté solaire de la patronne de ce petit hostal. 

Environ 40 km de chemins aujourd'hui, soit quelque chose comme 17% de l'étape. Ca y est, j'ai fait ma mise en jambes. 

Ce vendredi 5 mai, je me réveille de bonne heure. La météo est toujours radieuse. Depuis le départ, il fait en moyenne 12 degrés le matin, 23 à midi si je ne suis pas en altitude et 27 ou 28 en fin d'après-midi. Je pars vers 8h30 en direction de Talarn, un village à moins de cinq kilomètres au nord de Tremp. Après Talarn, je traverse une sorte de terrain militaire, d'après les grandes grilles et le porche, immense, que je passe. Il n'y a personne de garde. C'est assez étrange. Je me demande si j'ai le droit de passer là. Dans d’autres contrées, il m’est arrivé quelques problèmes avec ce genre de lieu.
 
Je ressors indemne, sans être arrêté qui plus est.
 
La première piste, de la balade du jour, démarre après les vignes que je viens de croiser (Photo du haut ci-dessous). La piste m'amène au village d'Esplugafreda. Au début, tout va toujours bien. Le revêtement est typique de la « gravel road » (photo de gauche ci-dessous). C'est bien roulant. Les choses se corsent quand je quitte cette portion, pour une autre bien plus « gravel » que « road » (photo de droite ci-dessous). Et les « gravel » ressemblent davantage à des pierres… 
 
Après Talarn
 
La piste grimpe en lacet, comme souvent en montagne. Elle est totalement défoncée et c'est plus un champ de pierres qu'une piste. Je passe un sale quart d'heure. En fait, cela dure bien une heure. Jusqu'à ce que je passe une barrière canadienne (photo de gauche sur les images ci-dessous)... De rage, après avoir vu qu'elle est un double portillon amovible (l’éducation ne se refait pas), je la défonce avec la moto. Je hurle en passant d’ailleurs.
 
Je m'arrête en haut de cette côte (photo de droite sur les images ci-dessous), dubitatif, sur ma manière d'aborder le problème... Qu'est-ce qui m'arrive ? Il faut que je me pose quelques minutes et que je réfléchisse à ça (photo du bas sur les images ci-dessous), en ayant les yeux fixés sur quelque chose de beau et de calme... 

 
En fait, mec, tu as la trouille... La trouille de tomber... Cette peur prend le dessus sur toi. Si je passe en revue mes craintes, quelles sont-elles ? 
 
      - La peur de descendre dans les pierres pour ne pas revivre ta première piste dans les pics d'Europe. C'était en 2014 avec l'ancienne, la Motoguzzi Stelvio. Un fer à repasser, sur les chemins, comparer à ta BMW. 
 
      - La peur de perdre ton frein arrière comme ce jour de juillet, toujours en 2014 sur les chemins des contrebandiers andorran. C'était . Le liquide avait bouilli. Bon, c'est vrai que la BM est aussi connue pour ça, mais cela ne t'es jamais arrivé. Et puis, tu as appris à gérer cela. 
 
      - La peur de rouler côté ravin pour ne pas revivre ta chute andalouse, lorsque tu as cru voir partir la moto dans le ravin et toi avec. C'était en 2014 toujours. Erreur de jeunesse, en ce temps là...
 
Bref, en somme, c'est l'année 2014 ton problème... Pas les chemins. Tu as 58 ans, merde! Tu veux te laisser guider par la peur ? Non mais tu vas ou, là ? 1,91 m, 110 kg et une meule du tonnerre pour rouler dans les chemins... Tu frises le ridicule, mec! Depuis 2014, tu as bénéficié des enseignements du Cascadeur, Jean-Pierre Goy. Alors, bordel, calme toi! Utilise le moteur pour avoir la bonne inertie. Maîtrise ta vitesse en descente, avec le frein arrière, et profite du mode enduro de ta moto. Fais confiance à ta machine. Tu le sais, ta moto, c'est juste un gros VTT. L'électronique gère un tas de choses, qui font que c'est bien plus facile à conduire dans les chemins, que ton fer à repasser précédent que tu as, d'ailleurs, réussi à plus ou moins maîtrisé. 
 
Et rappelle toi : le regard - Toujours loin, le regard, dans la pente et là où tu veux être après le virage, pas là où est le problème. Pense à Jean-Pierre... Si le film « les Bronzés font du tout-terrain » était sorti, Jean-Pierre aurait eu le rôle du moniteur. Et il n'aurait jamais parlé du « planté du bâton », mais du regard… Bordel! Loin, le regard. Ensuite, il t'aurait emmené prendre un p'tit vin chaud. 
 
Tu es là pour prendre du plaisir, garçon. Alors quoi ? Tu as peur de la casser ta moto ? Non. Tu as même mis des valises souples pour ne pas être obnubilé par des chocs sur tes caisses en alu, alors quoi encore ? 
 
Vu comme ça! Cela me remet le cerveau en place. 
 
Et maintenant ? Que le bonheur commence! Je me remets en selle, plus léger et totalement recentrer. Je descends les pentes en première, avec une vitesse maîtrisée. Je me joue des secousses, dues aux pierres qui roulent, en tenant mon guidon fermement, mais sans crispation. Le regard se porte là où je veux être (Merci Jean-Pierre) et tout va pour le mieux, enfin. 
 
Enfin du plaisir... Quelle belle journée! Et le p'tit vin chaud ? Ou est-il ? 
   
 
 
Je sors de ces 25 kilomètres de piste, transformé. Oublier les craintes, tout en restant prudent tout de même. Cette petite introspection m'a fait le plus grand bien. Je peux rejoindre la portion suivante. Je passe en Aragon, maintenant. 
 
Près de Sopeira
 
Mirador de la Camara de Montanuy
 
Le col de Fadas, magnifique, me conduit vers Castejon-de-Sos. Je veux rejoindre le village de Chia pour monter aux 2000 mètres du Puerto de Sahun. Si je ne me trompe pas, c'est là que pointe la flèche rouge sur la photo ci-dessous. Ce village « Chia » ? A t’il quelque chose à voir avec ce que les « bouffeurs de graines bobo » du monde entier (même en Iran, j’en ai vu) apprécient ? La « Salvia Hispanica ». 
 
 
Chia, j'y suis passé au printemps dernier, lors de ma balade aragonaise  (voir ici). J'ai découvert la piste, que je vais refaire aujourd’hui, par hasard, car sur les cartes, je n'avais pas vu que c'était une « gravel road ». Et cette piste est tout simplement fantastique. Elle est assez facile, large et permet de passer du village de Chia au village de Plan. La photo de gauche ci-dessous montre le village. La piste commence 3 km plus loin. Le paysage de la photo du bas est pris à 1700 mètres. 

 
Je monte vite. Il n'y a personne. Ca secoue un peu, mais cela ne me pose aucun problème. Je finis par réduire l’allure, non pas que je craigne de me vautrer, mais je croise de nombreuses marmottes, en train de se dorer la pilule sur la route. Inutile que je les effraie davantage. Je repasse en deuxième et monte à 20 km/h maximum. 
 
Au sommet, je trouve un plaisir immense à poser mon regard sur les paysages offerts par la nature et la montagne. Le GPS me l'indique, je suis bien à 2009 mètres d'altitude. Je crois bien que la table de pique-nique qui se trouve là va me servir...  

 
Une des plus belles vues durant un repas. La journée est vraiment très belle. Cette balade me restera en mémoire pour diverses raisons. L’une d’elles est le fait de rouler, à moto, sur cette piste. 

 
Arrivé en bas, je retrouve le bitume. Je remets l'airbag et pars en direction de la fin de mon étape. Avant d'y arriver, je voulais refaire, à nouveau, le superbe canyon d'Anisclo, mais la route est fermée à la circulation. Je dois faire demi-tour. Peut-être que le grand panneau jaune à l'entrée de la route voulait dire qu'elle était fermée... Cortada! Oui, je crois bien que c'était ça, qui était écrit. 
 
J'arrive dans le parc d'Ordesa, passe Boltona et arrive au village de Sieste.

Hôtel Labadia de Sieste
 

La vue depuis la place devant l'hôtel

Je suis là pour deux nuits, du repos, de la lecture et de la randonnée, car demain, je ne roule pas.  D'ici là, je fais un peu de lessive et j'ai un truc à dire: ne laissez pas vos caleçons et autres bricoles posés sur le bord de la fenêtre quand vous êtes au dernier étage sur les toits... J'ai fini par trouver un balai, afin de m'éviter une séance d’escalade et une chute de toiture... 

Cette belle journée est une balade de 186 kilomètres, dont 55 hors bitume. Soit 30 % environ. 
 

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1 commentaire:

  1. merci pour le partage. Je pense que l'itinéraire pourra sertir pour un voyage en fourgon à deux (mais en restant sur le bitume). On a fait en duo en Ténéré 1200 la piste en Chia et Plan, un vrai bon souvenir.

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